Les langues paternelles

Il est sorti le livre. En janvier. Il est là. Je les entends déjà, les pauvres langues paternelles. Tu en as encore fait de belles, mon fils. C'est quoi ce livre? Ca parle de moi? Je le savais, que tu y viendrais. Mais ce masque, là, ça rime à quoi? Tu ne te trouves pas assez beau, c'est ça? Ou alors je te fais honte? Mais non papa. D'abord tu es mort. C'est par rapport aux enfants. Je. Bon. C'est vrai que c'est une situation impossible papa. Ca ne m'étonne pas mon fils. Tu tiens de moi.

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Lieu : France

10 juin 2006

Mes chansons à n'y rien comprendre

Vous n'y comprenez rien parfois à mes chansons d'ici. Je le sais bien. Rien de rien. Ah vous surfez tranquilles parfois vous arrivez de chez Daniel là-haut. Et patatras. Qu'est ce qu'il nous chante celui-là?

Ces chansons-là que je vous chante ici sont à n'y rien comprendre. Ce sont celles-là je n'y peux rien que je pourrais poursuivre jusqu'au bout de la terre.

Ces chansons-là qui me poursuivent que je poursuis ces chansons-là sont celles que je n'ai pas comprises et qui ne sont jamais passées. Les seules chansons qui vaillent, celles qui se gravent dans la tête des petits et qui y restent s'y incrustent, sont celles qu'on ne comprend pas. Avec leurs hautes paroles massives, de vraies armoires normandes. Ce sont celles-là que j'aimerais écrire un jour. Des chansons qui sortent de nulle part et ne vont nulle part et ne demandent rien d'autre que d'être des chansons. J'ai vu passer le train. De bon matin. Pourquoi de bon matin? Tu t'étais levé tôt ce matin? Une insomnie peut-être. Papa c'était un lapin. Qui s'appelait JB Chopin. Pourquoi JB Chopin? Dis-nous donc, Aristide. Allez accouche Bruant. Raconte.

C'est toujours sans le savoir sans le vouloir qu'on brouille les pistes. Pour des raisons idiotes parfois, pour la rime ou le nombre de pieds, ou un pari stupide. C'est quand les mots sont convoqués pour des raisons idiotes avec une flûte de mirliton, c'est bien à ce moment qu'ils crachent tout leur jus, et deviennent vraiment intéressants. Mais le petit jules était de la tierce. Qui soutient la gerce. Tiens par exemple. Devant la cheminée. Imaginez la scène. Petit David tout petit devant ces personnages. Le petit jules était de la tierce. Voyant qu'a marchait pas au pantre. D'un coup de surin lui troua le ventre. Ca rigole pas rue Saint Vincent sur la rive droite. Ca rigole pas le pantre. Alors que finalement si c'était seulement pour la rime avec ventre? Ce sont ces mots qui restent, pourquoi ceux-là? Ou bien encore tenez finalement finalement, deux adverbes jumeaux hauts comme des falaises qui me reviennent cette semaine. Finalement finalement. Pour être vieux sans êtres adultes. Pourquoi ces mots-là et pas d'autres? Années soixante je l'entends à la radio de vava sur la cheminée cette chanson finalement finalement. Avec ces deux adverbes plus hauts que toutes les flêches de toutes les cathédrales. Ces mots qui pour toujours indiquent quelque chose qui ressemble tellement à une direction.

Et si vous me disiez les vôtres? Vos chansons à n'y rien comprendre et qui pourtant ne sont jamais passées.

13 Comments:

Anonymous Anonyme said...

"Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage..." chantait l'homme à moustache. Il a vu les cent paysages cachés dans nos têtes pendant que le poète troubadour empilait "les petites boîtes très étroites... toutes pareilles" qui nous sortent du crâne. Quel bonheur les chansons, que l'on aime avant de les comprendre. Ce qui, à mon sens, en réhausse la saveur, une fois qu'on en saisit la poésie ou l'insolence, ces formidables irrévérences des chansons de notre enfance. Si parfois, pris d'indolence, nous passions à côté de vers au velours inscrusté d'échardes, ces refrains chantés à vive voix nous rappellent brusquement pourquoi ils sont là. Bon alors David, reprenez après moi : "je suis de la mauvaise herbe, braves gens, braves..." ou alors en hommage à cet homme de ma famille, d'il y a longtemps longtemps, bien avant mes grands-parents, vous ne le connaissez peut-être pas, je ne vous en veux pas, on ne l'apprend pas à l'école, ni au collège, ni au lycée et encore moins dans les classes d'après, on le découvre par grande curiosité ou par transmission (maternelle en ce qui me concerne) mais chantez avec moi (elle est pas vieille celle-là ?): "ils étaient vingt ou trente, brigands dans une bande, tous habillés..."
Elle est jamais passée, jamais dépassée, en tout cas pour moi.

18:19  
Blogger Daniel Schneidermann said...

Ciel, une descendante de Mandrin! Une lectrice de grand chemin !

20:17  
Anonymous Anonyme said...

Ciel, vous connaissez ! On a les aieux qu'on peut, et oui. Si, de mon arbre, il descendait aujourd'hui, sans doute se trouverait-il en pays conquis, cet ancêtre bandit. Il en aurait de la concurrence au royaume de France, Mandrin, pilleur de bourses bien garnies (pas seulement celles des curés). Et lui aussi, à priori, brigand, voleur, et tout ce qui s'ensuit, un jour, a donné la vie. Je me demande s'il parlait les langues paternelles... et s'il chantait des chansons. Sûrement. Peut-être pas Nini peau de chien mais quelque chose d'approchant.

20:38  
Anonymous Anonyme said...

Ah, les chansonnettes... Je crois bien que c'est tout récent. Une sorte d'éducation à l'envers. A 13-14 ans, je n'ouvrais le lecteur CD que pour les préludes de debussy, les novelettes ou le clavier bien tempéré. Les chansons, mais c'est quoi ? C'est pas sérieux ! Pas sérieux, jusqu'à ce jour où je me prends un gros coup de poing dans le ventre en écoutant celles de trenet. S'il y en a un qui sait chanter la mélancolie, au temps des cerises, des mam'zelle clio ou des amours mortes, c'est bien lui...Et puis henri salvador, qui s'en va clopin-clopant. Bourvil, son ptit bal perdu et son frère d'angleterre. Brel, plus froid, plus dur, mais peut-être aussi plus près de la vie réelle, des mots qui frappent et vont se répéter des jours durant, et cette absolue tristesse des chansons en majeur : ils pleurent leur prénoms comme de jeunes mariés, j'ai jamais rien fait d'autre qu'arriver...Perdu dans ce kaléidoscope, un bébé éléphant nommé dick annegarn s'enfuit l'air apeuré.
Voilà quelques chansons qui me trottent dans la tête, mais à y réfléchir, quelles sont celles que j'écoutait avant ? A l'âge où tous les enfants en écoutent ? Je me souviens d'un 33 tours d'Yves Duteil, à une époque où je regardais les dessins de la pochette sans pouvoir en lire les titres. Deux ou trois libellules en vol, suivaient lucille. Toi qui fais les hommes, fais-moi des ailes... Sûrement trop jeune pour être mélancolique, juste un regard perdu plein de gravité fragile. Et qui donnerait le vertige aux adultes égarés par ici.

23:32  
Blogger Daniel Schneidermann said...

Trenet, ma préférée c'est La folle complainte. Les jours de repassage, dans la maison qui dort, la bonne n'est pas sa sage. Mais on la garde. Encore. Totalement folle. Je n'arrive pas à croire que vous ayez vraiment grandi sans chansons, Valentine. Même pas des chansons, le soir pour s'endormir? A propos de l'aieul de Bernadette, dans le même disque de Montand, il y a le roi Renaud. Alors celle-là m'impressionnait. De guerre revint. Avec ses tripes dans sa main. Dans sa main? Mais comment il a fait pour les porter tout le chemin? Et quand il descendait de cheval? Et d'abord, c'est comment, des tripes? Et pourquoi dans sa main? Etc. Et toujours dans le même disque, les canuts tout nus. Eh les gars, habillez-vous! Vous avez pas froid? Et faites gaffe, il pourrait y avoir des gens qui passent! Elle doit parler aux Lyonnais de ce blog, celle-ci, non?

09:13  
Anonymous Anonyme said...

Oh, comme, vous avez raison, Monsieur Serge, les chansons, elles s'incrustent en nous sans notre accord, sans nous. Elles entrent par effraction, et impossible de les en déloger ensuite. Un des premiers souvenirs musicaux, c'est ça http://www.frmusique.ru/texts/c/corringe_michel/route.htm. "désir de concrétiser un symbole, de posséder l'unique beauté que l'on nomme Liberté", je chante, je chante sans rien y comprendre. Sauf que le type n'a pas où dormir. Mais qu'il est content quand même.
Et puis, avec des parents fans de Barbara, j'ai entendu toutes ses chansons. Quand l'automne approchait, que la nuit nous rattrapait plus tôt, souvent, souvent, avant que papa n'arrive du travail, maman prenait ce grand 33 tours http://www.paroles.net/chansons/14141.htm
Drouot, ça ne voulait rien dire, et pour le coup, je ne saisissais rien d'autre que le regard perdu de ma maman, pas triste, non. Juste nostalgique.

Et puis, celle-là, c'est celle de papa, parce que la guerre, disait-il : http://www.paroles.net/chansons/15440.htm
Et puis un jour, il me racontera, bien plus tard, avoir aimé une femme, à Gottingen. L'avoir cherchée partout, à Gottingen. Gottingen.


Muppy (lyonnaise aussi)

10:35  
Anonymous Anonyme said...

Alors mon David, tu m'cherches et bien voilà !!!
D'hier et d'aujourd'hui, probablement encore de demain, jamais passées.
Qu'as-tu appris à l'école mon fils, qu'as-tu appris aujourd'hui... Tu m'la copieras 100 fois.


Pour chanter Veni Creator
Il faut avoir chasuble d'or
Pour chanter Veni Creator
Il faut avoir chasuble d'or
Nous en tissons pour vous, Grands de l'Eglise,
Et nous, pauvres canuts, n'avons pas de chemises !

Refrain
C'est nous les canuts,
Nous allons tout nus !

Pour gouverner, il faut avoir
Manteau et rubans en sautoir
Pour gouverner , il faut avoir
Manteau et rubans en sautoir
Nous en tissons pour vous, Grands de la Terre,
Et nous, pauvres canuts, sans drap on nous enterre !

Refrain
C'est nous les canuts,
Nous allons tout nus !

Mais notre règne arrivera
Quand votre règne finira.
Mais notre règne arrivera
Quand votre règne finira.
Nous tisserons le linceul du vieux monde,
Car on entend déjà la révolte qui gronde !

Refrain
C'est nous les canuts,
Nous n'irons plus nus !

10:49  
Blogger Daniel Schneidermann said...

Evidemment Gottingen. Evidemment même si on n'y est jamais allé évidemment on les a dans la tête les enfants blonds de Gottingen. Evidemment on n'ira jamais avec toute cette barrière de nasales, barrière infranchissable. On n'y est pas allé mais on y est quand même allé. Mais l'adresse la plus à n'y rien comprendre de Barbara, celle qui est si bien entrée en moi, et désormais indélogeable, c'est quand même le vingt cinq rue de la Grange aux loups. Longue plainte des loups sous la pluie de Nantes. Interminable rue menaçante et grise lentement remontée, numéro après numéro. Vingt et un. Vingt trois. Vingt cinq. Silence maussade des quatre hommes assis près de la cheminée, qui portent l'habit du dimanche. La lumière était froide et blanche.

10:58  
Blogger Daniel Schneidermann said...

J'étais certain Roland que vous n'étiez pas bien loin. C'est quoi votre histoire avec cette chanson. Vous vous souvenez la première fois que vous l'avez entendue, quels mots surnageaient?

11:01  
Anonymous Anonyme said...

C'est tout simple David, la première fois c'était un repas avec mes nouveaux amis lyonnais en 1966 (souviens-toi je suis né à la capitale). Aucun mot ne surnageait mais l'émotion et la profondeur dans les voix, les yeux qui brillaient. Eux que l'on disait froids m'ont fait comprendre que j'étais de leur bande. J'étais heureux et malheureux à la fois, de ne pas connaître les mots pour unir ma voix à la leur. Je me suis rattrapé depuis. Des histoires de chanson j'en connais plein d'autres.
J'ai vécu cette époque où à la fin du repas chacun allait de sa rangaine. Allez tonton, le temps des cerises, allez Papa j'ai la rate qui s'dilate allez Maman chante mon homme, allez tous ensemble, les gars d'ménilmontant, en enfin mon tonton René qui bissait le mauvais garçon qu'avait des allures pas très catholiques.

12:17  
Anonymous Anonyme said...

Il y a des canuts tout nus ? Où ça ? On ne m'aurait rien dit, je n'en aurais rien su ? Même née et élevée à Lyon, les chansons de canuts n'ont pas bercé mon enfance (bien sûr, si j'avais su qu'ils étaient tout nu...), mes parents étant plutôt issus du milieu rural, paysan. J'ai découvert les ouvriers en soie plus tard, en cherchant à comprendre l'histoire de Lyon, à connaître mieux ma ville. Bien modestement évidemment, comme une habitante. Des chansons, j'en entendais, j'en apprenais lors des fêtes de famille (nombreuse), en colo aussi. Comme mes parents avaient une auto mais pas d'auto radio, j'en chantais dans la voiture (à tue tête) lorsque nous revenions d'un endroit ou d'un autre. C'est drôle de ce souvenir de ces moments-là. C'est grave docteur ?

13:00  
Anonymous Anonyme said...

Ah, vous dire mes chansons? :"panique, panique.....c'est justement là le hic!!!!"....mais non, vous n'y êtes pas ,ce n'est pas le début de l'une d'entre elles !!!!... panique,car mes chansons à n'y rien comprendre (et celles où l'on comprend trop bien), ne sont jamais passées...elles sont toutes en moi, elles m'accompagent, mais comment dire ?...qu'elles soient tapies, ou à fleur de peau,enfouies ou nouvellement arrivées, je les rédécouvre à chaque écoute, en maitrise très peu par coeur...et du coup,beaucoup de peine à les dire,à choisir,à vous en parler... elles accourent toutes ensembles commes des affolées qui voudraient poinçonner leur ticket en premier, être en pole position...!!...les amants, les vieux, l'inacessible étoile, ma plus belle histoire d'amour, dis quand reviendras -tu,l'île aux mimosas,Nantes..Brel,Barbara...mes préférés depuis toujours, des poètes!...rien à rajouter à cet instant...Chapeu bas...chut,je les entends ... Les chansons de mon enfance? ces refrains qui vous bercent?....flou artistique,pas encore arrivés à la surface?...j'en ai une sur le mois de Mai,que l'on chantait ados dans les rues ,la nuit... je vous la conterais un jour si le coeur vous en dit....en attendant je vais aller fredonner "debout les gars" (ouh,ça fait une paye,çà!), les canuts, mandrin,et le mauvais garçon qu'avait des allures pas très catholiques!!!!Alfred et Pierre, vous qui n'êtes plus là aujourd'hui, pour nous l'avoir si bien chantée ce jour-là !....merci !!
BERNADETTE

22:53  
Anonymous Anonyme said...

"J'avais une vie d'dingue, quand j'étais chanteur". Dans une autre vie, tous les jours à la sortie du métro Bibliothèque François-Mitterrand (la TGB des journalistes), s'affichait sous mes yeux, un mètre de haut sur trente de large : "J'ai appris que Mick Jagger est mort dernièrement", bombé à l'aérosol sur le mur d'un chantier. Depuis, l'air revient périodiquement tourner en boucle. Par petits morceaux. Encore plus ces jours derniers, depuis Cannes. "Ma femme attendaaait / planquée / Dans la Mercedes / Elle s'est fait j'ter dans l'IIIndre / Par tout mon fan club / J'avais une vie d'dingue / Quand j'étais chanteur". Faites la vôtre, cette chanson, vous le chanteur masqué. Vous pouvez aussi la fredonner dans votre bain, entre deux interviews imaginaires, comme le héros de ce film anglais qui s'invente une gloire à venir en recevant dans sa baignoire comme dans une suite de grand hôtel les journalistes du monde entier. "Les gens de la poliiice / Me reconnaissaient / Mes excès de viteeesse / J'les payais jamais..."

13:36  

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